Dans 20-25 nds, plein vent arrière, les choses s’accélèrent sur l’eau

Photo : Ch.Guigueno / Pipof.com/voile

Dans 20-25 nds, plein vent arrière, les choses s’accélèrent sur l’eau. 10-12 nds au speedo : les Figaro Bénéteau déboulent sous spi et ça se corse à mesure que la flotte se resserre et se rapproche du point de passage obligé, aux abords de l’archipel portugais. " Le ciel est dégagé. Vue imprenable sur la mer et là je vois un bateau. C’est nouveau, c’est Cercle Vert, le premier.... Ca fait du bien au moral ! " , lâche Pascal Bidegorry (Banque Poulaire). Le voilà remonté comme un pendule, prêt à tous les coups tactiques pour coiffer - même au poteau de la porte de Madère ! - les compères de Cercle Vert. Un mille devant, pas de mystère : " Une belle bagarre se prépare, confirme depuis l’autre Figaro Dominic Vittet. Les bateaux de tête se resserrent et convergent tous vers le même point : Madère. Hier, on a eu un poisson ventouse qui s’est accroché à l’arrière du bateau et on a eu beaucoup de mal à s’en débarrasser. Aujourd’hui, on a un autre poisson ventouse près de nous, beaucoup plus gros cette fois puisqu’il s’agit de Banque Populaire ! "... Pas facile non plus de s’en débarrasser alors qu’il reste moins de 250 milles à parcourir, à l’heure où nous écrivons ces lignes et que ces deux duos progressent au contact. S’ils poursuivent à ce rythme, c’est demain en début d’après-midi, qu’on connaîtra le tiercé gagnant de Madère. L’affaire ne manque pas de suspense...

Car derrière aussi les uns et les autres ne baissent pas les armes égales. Loin s’en faut. Ils se tiennent les dans un mouchoir de milles et n’ont pas l’intention de baisser la garde alors qu’ils progressent dans des conditions de vent stables, propices aux belles pointes de vitesse Vitesse #speedsailing . Argos - en vrai bison futé du large - annonce des bouchons au passage de la porte. Il pointe en effet des pelotons, des petits groupes des bateaux qui ne se lâchent pas d’un tableau arrière. Il y a notamment le club des cinq, emmené par la paire Le Cléac’h-Troussel (Groupe SCE-Le Télégramme). Là dans ces parages, on croise de sérieux clients, tels Delta Dore (Beyou-De Pavant), Skipper AG2R (Jacq-De Broc), ou encore Thales (Tabarly-Nélias)... A bord, les duos connaissent toutes les ficelles de leur monotype Monotype #sportboats et n’ont pas leur pareil pour en tirer le meilleur. Rodolphe Jacq et Bertrand de Broc ne sont-ils pas les grands gagnants du jour du Top Chrono AG2R Prévoyance ?

Surprises à Madère ?

Va y avoir du sport ! Et c’est tant mieux. Tous l’annoncent haut et fort, à l’instar de Benoît Petit (Défi Voile Santé), pointé à quelques encablures de Gedimat (Tripon-Grimont) : " Nous grappillons mille après mille. Notre état d’esprit est bon et on garde le couteau bien accroché entre les dents... ". Même son de cloche depuis le bateau normand Maisons Pierre (Lespesqueux-Lecharpentier) : " Le vent est à 25-28 nds maintenant. Nous avons retrouvé nos camarades : Connivence à 2 milles derrière et Charente-Scutum, un demi mille sur l’avant bâbord. Le moral est en très forte hausse. Point de mire : Bostick Findley et Gedimat. "

" Nous devons maintenant tenir le rythme mais aussi faire certains choix tactiques, car l’approche de Madère peut cacher de grosses surprises ", explique d’ailleurs Gérald Veniard (Charente-Scutum) "Il y a un minimum dépressionnaire sur le Maroc, qui va venir perturber l’approche de Madère et rendre la situation plus difficile que prévue. Il faut faire de toute façon un choix tactique car on ne peut pas faire route directe. Les prochaines heures s’annoncent très intéressantes : la guerre des empannages va certainement commencer et tous doivent garder la tête froide sous le soleil local.

Du sport, du suspense... et du bonheur, ce qui ne gâche rien ! Cette navigation sur fond de compétition n’entame en effet rien le plaisir que tous les équipages ont d’être en mer. " On est en pleine forme. On est au portant, plein vent arrière, le bateau avance à 13 nds. On a fait quelques bords sous spi avec les dauphins. On sait pourquoi on est là avec des moments de bonheurs comme ça ! " lâche enthousiaste Arnaud Guillouet (SOR TMC), pas peu fier d’afficher son plaisir d’amateur... qui aime et en redemande. Et dire que ça ne fait que commencer !..

L.F.

Echos du Large

 Erwan Tabarly (Thalès) : " Beau temps, belle mer... de quoi faire une bonne approche sur Madère, où on compte arriver dans la soirée de demain. D’ici Madère on devrait avoir des rotations de vents assez minimes, juste quelques bascules à négocier mais pas de gros pièges. Les pièges, c’est pour après Madère car on attend une dépression qui va mettre la zone dans le secteur, du coup on risque de ne pas avoir beaucoup d’alizés à moins d’aller les chercher plus au sud. Pour le moment on a une moyenne de 20 nds de vent et on navigue avec Skipper AG2R et Delta Dore. Ca stimule, on est beaucoup plus attentifs aux réglages et puis il reste encore un empannage à faire avant Madère donc rien n’est joué... "

 Benoît Lequin, co-équipier de Jean-Marc Sparfel à bord de Groupe Coupechoux : "Voilà, notre rythme est à peu près en place, nous faisons route sur Madère pour le moment sous spi, en espérant que se sera de la même façon jusque Saint-Barth ! Comme le dit Jean-Marc, on n’ a pas besoin de le remonter au près... Sur le bateau, tout va bien, aussi bien du point de vue technique que de vie à bord... Nous ne sommes pas content d’avoir perdu ces places... On remarque que notre préparation a été bien au niveau manoeuvres, vie a bord, préparation du bateau, mais un gros manque se situe au niveau de la réception des infos météo (ce n’est pas très clair), de la stratégie de course et de la météo pure..."

Info Magali Jousselin

 Thierry Chabagny, Défi Santé Voile : "Actuellement nous avons 22 nds de vent et une mer hachée. Nous avançons à 8,5 nds en faisant des pointes à 12 nds. Ca va assez vite, il ne reste plus que 280 milles pour Madère. Pendant deux jours, nous n’avons vu aucun bateau et tout à coup ce matin nous avons vu apparaître Gedimat à bâbord ! C’est sympa d’avoir quelque-chose à regarder ! Comme il y a pas mal de houle, la visibilité est réduite, il y a des cargos de temps en temps mais rarement. Ici, c’est le no man’s land ! Nous sommes en train de grappiller mille par mille, notre dégolfage nous coûte cher !" ... "Si la pétole est au rendez-vous dans les îles elle peut nous sauver la vie ! Elle permettrait au deuxième groupe dans lequel nous sommes de revenir sur les premiers par l’arrière. Ca peut réduire les écarts mais, pour l’instant ... il y a du vent à Madère !"

Info Laurence Caraes / Kaori

 Rodolphe Jacq, Skipper AG2R : « Ah bon ? c’est une super nouvelle... Attends. Bertrand, hé, Bertrand, on a été les plus rapides ces dernières 24 heures 24 heures Record de distance parcourue sur 24 heures  !. » « On a cumulé les galères. Déjà, nous n’arrivons pas à récupérer les positionnements ! des autres concurrents depuis le départ, c’est pratique comme ça... Pendant plus de 30 heures, nous étions seuls sur l’eau sans savoir où étaient les autres, là, ça va mieux, on voit Erwan (Tabarly) et Jeremy (Beyou) derrière » « Pour le moment, on est sous spi, à 12/14 nœuds, plein vent arrière, donc, nous ne sommes pas pénalisés, mais si nous devons envoyer le génois, j’ai bien peur que ça ne ressemble à un 4/4 qui prendrait le départ du Dakar avec trois roues. Forcément, tu vas moins vite... L’approche de Madère va être Rock’n Roll, ça pue le vent dans le nez cette affaire. Il y aura quelques surprises, on une belle dépression en plein devant qui va nous tomber dessus à ce moment là, ça va partir de tous les côtés. » 

Info Véronique Guillou / Rivacom

 Gérald Véniard, Charente Maritime : "C’est clair : nous avons la tête dans le guidon ! Nous ne sommes pas loin de la dixième place car nous avons longtemps navigué au contact de deux autres bateaux hier après-midi. Et puis cette nuit, nous avons décidé d’attaquer tels des sioux et nous sommes partis de notre côté. Nous étions trop influencés par ceux qui naviguaient à côté de nous. Nous nous sentons mieux seuls et c’est ainsi que nous sommes performants ! Nous naviguons actuellement dans 20 nœuds de vent de Nord-Est", continue Gérald. "Mais si le vent est stable en force, il est très instable en direction et c’est un peu chaud dans les surfs sous spi."

Info Pierrick Garrenne / Windward

 Jérémie Béyou et Kito de Pavant, Delta Dore : " Nous sommes plutôt satisfaits d’être aussi bien remontés. Il y a plusieurs phénomènes pour l’expliquer. Nous nous sommes mieux placés au vent, plus à l’ouest, et le fait d’être avec deux bateaux qui vont vite c’est génial. Nous nous tirons la bourre avec Thalès et Skipper AG2R et le plus rapide pousse les deux autres. Nous avons Skipper AG2R à 200 mètres et Thalès à 400 mètres ! C’est un vrai speed test géant : après 500 milles à ne pas se lâcher, nous avons plus de deux cents mètres d’avance. Ca veut dire que nous laissons derrière nous deux spis North et que le nôtre (Incidences ndlr) va plutôt bien ! Jérémie vient de prendre son quart. Il dormait bien et je l’ai appelé pour l’empannage. Les trois bateaux ont empanné ensemble. La journée va encore être bien agréable même si ça caille encore un peu avec le vent de Nord."

Info L.Caraes / Kaori

 Armel Tripon, Gédimat : « pendant quatre à cinq heures, on a eu un boute (cordage, NDR) coincé dans la quille. Et comme nous étions tous seuls, nous avons mis du temps à nous en apercevoir : c’est quand on a vu Défi Santé Voile qui avançait plus vite que nous qu’on a compris qu’il y a avait un réel problème. On a du affaler le spi et faire demi tout pour nous débarrasser du boute. Avec Damien, ça nous a bien énervés et je pense qu’on a perdu quatre ou cinq places dans ce coup de malchance ».