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Transat 650 • 2e étape

Manuard, Le Blévec, etc. : peuvent-ils battre Isabelle Joschke ?

Écart historique entre les premiers prototypes avant le départ samedi de Funchal

vendredi 5 octobre 2007Christophe Guigueno

Tous contre une ! Telle est la donne, la devise, de la seconde étape de la Transat 650 Charente Maritime – Bahia dont le départ va être donné samedi de Funchal. Au terme du premier run, Isabelle Joschke a créé de gros écarts sur ses poursuivants. Alors, Manuard, Le Blévec ou encore Deshayes et Hardy ont-ils leurs chances ?

Le commentaire qui revient souvent après une première étape de la Transat 650 (la course s’est toujours disputée en deux parties sauf en 93 quand la première étape avait été annulée) c’est qu’il ne s’agissait que d’une mise en jambe avant le grand saut en travers de l’Atlantique. L’historique de la Transat 650 entre La Rochelle et le Brésil prouve pourtant le contraire.
- La première édition de la Mini-Transat Mini-Transat #MiniTransat sur ce parcours inventé par les Rochelais de GPO s’est déroulée en 2001. Yannick Bestaven avait alors remporté la course, dont la première étape. Il était arrivé à Lanzarote 1h52 minutes devant son compère Arnaud Boissières (parti sur un plan Magnen identique). Sam Manuard (déjà là) avait terminé 3e à 6h27 de Bestaven. Yves Le Blévec (présent lui-aussi) avait terminé 5e à 15h40 ! Et personne n’avait repris de temps à Yannick.
- Deux ans plus tard, en 2003, c’est Sam Manuard (de retour) qui s’impose à Lanzarote. Il devance l’Américain Jonathan McKee de 38 minutes seulement. Armel Tripon, futur vainqueur est troisième à 4h17, 1h36 devant Fred Duthil. Dans la deuxième étape, McKee est en tête avant de démâter. Manuard prend le relais pour casser lui-aussi. Duthil a démâté dès le départ. La victoire revient à Armel Tripon. Il n’a repris ses 4 heures de retard que sur des circonstances de course.
- En 2005, c’est Corentin Douguet qui gagne la première étape. Il devance Sébastien Gladu d’1h15 et Yves Le Blévec (encore !) de 3 heures. Alex Pella est 7e avec 9h38 de retard et s’il gagne la deuxième étape à Salvador de Bahia, il ne parvient à grappiller que quelques minutes à Douguet. Le Nantais confirme que les premiers servis à l’escale sont les premiers servis à l’arrivée, si aucun incident de course ne vient interrompre sa course.

Cette année, Isabelle Joschke a donc elle aussi gagné la première manche ce qui la place logiquement comme la grande favorite pour la victoire finale. Mieux, elle repousse Sam Manuard (il ne lâche pas !) à 4h23, soit le plus grand écart jamais vu sur ce parcours en quatre édition ! Yves Le Blévec (ils le font exprès !) est lui à 5h13. Pour une troisième place, c’est moins pire que les 6h27 de Manuard en 2001 mais cela reste un gros écart. Quant aux autres, Ronan Deshayes est à 10 heures. Il y a 2 ans, ils étaient 8 à terminer en 10 heures. Et personne n’a jamais remonté un tel écart pour la victoire finale. Adrien Hardy lui est à 11 heures (avant sa pénalité de 2 heures), soit trois heures plus loin encore que sa même 5e place à Lanzarote en 2005. Voilà donc des données qui placent Isabelle Joschke sur un piédestal avant la grande traversée de plus de 3000 milles vers l’Amérique du Sud. Rapide, motivée, elle a marqué un sacré point sur ses adversaires. Mais, bien entendu, tout peut arriver sur ce parcours semé de quelques embûches comme la sortie de l’archipel de Madère, la traversée des Canaries, le passage du Pot-Au-Noir à son extrême ouest et, enfin, le final de Fernando da Cunha à Salvador.

Peu de temps avant le départ, Isabelle avoue en tout cas être « hyper concentrée. Pour moi, la course a déjà commencé. Sur la Transgascogne, j’ai perdu ma première place joliment sur la 2e étape. Alors, là, pour moi, il n’y a vraiment rien, rien qui est acquis. C’est clair que j’ai envie d’y aller, de me battre et que l’on puisse compter les points à l’arrivée. Je sais que cela ne va pas être facile. Et notamment à la fin, où les conditions météos sont favorables à certains bateaux, notamment à ceux de Sam Manuard et d’Yves Le Blévec, qui sont des bateaux de reaching (vent de travers). C’est sûr, pendant quelques jours, ils vont aller plus vite que moi. Rien n’est donc acquis ». [1] Rien n’est effectivement acquis avant que la ligne d’arrivée ne soit franchie et si elle part avec un joli bonus, l’interrogation viendra, comme elle le souligne, des performances des bateaux de Manuard et Le Blévec au reaching. « Degrémont – Synergie », le mini d’Isabelle est un plan Finot-Conq construit chez Amco par Thierry Fagnen. Sam Manuard a construit et dessiné son « Sitting Bull ». Yves Le Blévec a lui choisi un plan Lombard pour « Actual Intérim » qu’il a aussi construit lui-même. Ces trois bateaux ont été lancés en 2006 pour celui d’Yves et au début 2007 pour ceux d’Isabelle et Sam.

Pascal Conq qui a dessiné le mini d’Isabelle explique le concept de son 6,50m : « On a pris le parti de ne pas être extrême quand on a conçu le bateau avec Thierry Fagnen. On ne voulait pas perdre les avantages acquis sur les bateaux précédents (ndr : le fameux 151 vainqueur avec Tripon en particulier). On n’est donc pas allé à fond dans le coin pour faire un bateau plus polyvalent même s’il y a quand même un gain de puissance sur les formes ! » Et dans le coin, on retrouve les plans Manuard et Lombard plus taillés pour le reaching comme le dit plus haut Isabelle. Or, sur la première étape, la descente s’est faite au portant, privilégiant le bateau polyvalent aux luges conçues pour des allures moins abattues. Sur le parcours de la deuxième manche, la descente des Canaries au Pot-Au-Noir devrait se jouer dans les alizés au portant débridé. Puis après l’île de Fernando, la descente le long des côtes brésiliennes devrait se disputer sur une allure plus serrée, au reaching. Voilà qui pourrait donc avantager, à la régulière, les autres concurrents d’Isabelle. Pourtant « à aucun moment, elle n’a été rattrapée sur la première étape » rappelle Pascal Conq. L’architecte tente par la même occasion d’évaluer l’avantage de ces bateaux de reaching sur celui de la leader. « Avec 0,1 nœud d’avantage à cette allure, cela fait 2,4 milles sur 24 heures 24 heures Record de distance parcourue sur 24 heures . À 6 nœuds, cela permet de rattraper 4 heures. » Faut encore qu’il y ait dix jours de navigation au reaching sur la dernière manche.

Entre les incidents de course, les passages délicats et le petit avantage des machines de reaching, cela peut encore bien jouer sur la deuxième étape. Mais Isabelle part avec un bel avantage, tant chronométrique que psychologique sur ces adversaires de la catégorie prototypes. Alors faites vos jeux ! Joschke, Manuard, Le Blévec ou un autre ? Réponse à Bahia. Puis comme le dit Yves, en deuxième chasseur, derrière Isabelle : « Je peux observer et décider, c’est plus facile que de se sentir poursuivi ! » Un des chasseurs ou la chassée succèdera en tout cas à Douguet dans quelques jours.

Ch.Guigueno


[1Propos d’Isabelle Joschke : source Hickory.



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