Portrait

Patrick Morvan se ressert un petit coup de Rhum

Comme en 1982, il repart sur un catamaran de 15 mètres

jeudi 24 octobre 2002Redaction SSS [Source RP]

A 58 ans, Patrick Morvan aurait pu rester tranquillement sur les bords de la rivière du Belon (Finistère Sud) où il s’occupe, aux côtés de Sylviane Noblet, sa compagne, du fameux restaurant de fruits de mer « Chez Jacky ». C’était sans compter sur son goût de la compétition et sur l’attrait de la haute mer.


Jeune marin pêcheur à Concarneau, Patrick Morvan découvre le plaisir de la course en solitaire à la fin des années 1970, lors de la Course de l’Aurore, la future Solitaire du Figaro. Dès sa première participation en 1977, il monte sur le podium avec une belle deuxième place. Un exploit qu’il rééditera en 1978 (3e), puis en 1980 (2e), année où il est repéré par un industriel du transport, Roger Caille qui va lui confier quatre de ses bateaux.

A la barre des Jet Services, Patrick Morvan va écrire quelques-unes des plus belles pages de la course au large des années 1980, en battant notamment le record de la traversée de l’Atlantique en 8 jours, 16 heures et 36 minutes. Une belle aventure qui va s’arrêter brutalement un jour d’hiver 1985. Lors d’une nouvelle traversée de l’Atlantique, son grand catamaran chavire et l’un de ses équipiers disparaît. Le choc est brutal. Patrick Morvan décide de se retirer du monde de la course océanique.

S’il passe désormais le plus clair de son temps à terre, Patrick Morvan s’offre quand même quelques menus plaisirs en participant à de petites régates locales. Puis, la passion de la course reprenant le dessus, il rachète l’ancien monocoque de Michel Malinovsky, Kriter VIII qu’il rebaptise Dix de Lyon et avec lequel il va à nouveau sillonner les océans. Il réalise deux belles performances en remportant le Tour des Iles britanniques puis en prenant une honorable deuxième place, derrière Titouan Lamazou, lors de la Route du Rhum 1990.

Cette joie de courir qui l’habite depuis toujours, Patrick Morvan va ensuite la transmettre au fils de sa compagne, Yvan Noblet, pour lequel il construit un Mini Transat avant de disputer à ses côtés la Mini Fastnet. L’envie de se battre sur l’eau est encore bien présente. C’est donc naturellement, lorsqu’il rachète en 2000, le vénérable catamaran Edonil avec son gréement goélette si particulier, que Patrick Morvan pense qu’il possède un engin tout à fait capable, à condition de lui faire subir quelques modifications, de disputer à nouveau la Route du Rhum.

« J’avais un petit multicoque pour m’amuser, assure-t-il. Je ne voulais pas de bête de course. Mais, petit à petit, l’idée de participer à la Route du Rhum, une fois encore, à commencer à germer et je me suis mis à modifier mon bateau pour le rendre plus performant. » La rencontre avec un couple d’entrepreneur fait le reste. Son bateau s’appellera « Groupe France Epargne » et il prendra le départ, le samedi 9 novembre de la Route du Rhum.

Pour cette 3e participation, Patrick Morvan a bien l’intention de montrer ses étraves à ses six adversaires de la classe 2 multicoques (voiliers de 14,20m à 15,30 m). « Je sais que j’ai le plus petit bateau de cette classe, reconnaît Morvan. Ce sera sûrement pénalisant. Mais, si je prends le départ, c’est pour faire quelque chose. Sinon je resterais à la maison ! » Toujours l’envie d’en découdre…. Même s’il a juré que cette fois, ce serait la dernière !

Comme en 82, un catamaran de 50 pieds et qui porte le n°77

Mis à l’eau en 1982 afin de participer à la deuxième édition de la Route du Rhum, Groupe France Epargne est le plus petit voilier engagé dans la classe 2 multicoques de cette sixième édition. Construit par son premier propriétaire, Daniel Le Méné, ce catamaran qui se contenta pendant longtemps de pratiquer la croisière rapide, fut retrouvé, presque à l’abandon, par Patrick Morvan sur un quai d’un port de Bretagne. « Je l’avais repéré depuis longtemps, explique son skipper et il m’intéressait, car c’est un petit bateau performant et facile à mener, même en solitaire. »

Fort de son expérience sur de plus grosses unités, le skipper de Groupe France Epargne a entrepris, dès le rachat du bateau, il y a deux ans, d’importantes modifications : allongement du pont et mise en place de jupes à l’arrière, nouvelles étraves plus hautes, suppression des deux cockpits arrières et ajout d’un moteur dans chaque coque. Des travaux réalisés sous le contrôle de Gilles Ollier qui avait participé à sa conception originelle, il y a 20 ans, aux côtés de son architecte, Gilles Gahinet.

S’il a modifié la plate-forme, Patrick Morvan n’a pas souhaité changer le concept du gréement de type goélette : deux mâts de taille identiques, dotés de wishbones, comme ceux d’une planche à voile, implantés au milieu du bateau sur les bras de liaison reliant les deux coques. « J’ai simplement installé de nouveaux mâts, plus long de 3 m, et qui sont désormais en carbone. Cela m’a permis de gagner du poids et d’abaisser le centre de gravité de l’ensemble tout en me donnant plus de puissance. » Un gréement auquel il est possible d’ajouter des voiles d’avant (foc, genaker et spi) et qui sera facile manier, même par un homme seul, confronté à des conditions météos délicates. Un multicoque survitaminé, mais à taille humaine, avec lequel Patrick Morvan compte bien pouvoir jouer les trouble-fête dans une classe qui devrait être particulièrement disputée.

Information Gwenola Gallois


PALMARES

 1990 : 2e Route du Rhum (monocoque)
 1989 : 1er Tour des Iles britanniques (monocoque)
 1985 : 3e Monaco-New York
 1984 : Record de la traversée de l’Atlantique sur le catamaran Jet Services III
 1983 : 1er Lorient-Les Bermudes-Lorient (classe 2)
 1983 : 1er La Baule-Dakar (classe 2)
 1982 : Route du Rhum (abandon)
 1980 : 2e Solitaire du Figaro
 1977 : 2e Solitaire du Figaro



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