Vendée Globe • Imoca L’Occitane
Clarisse Crémer : "J’ai l’impression de sortir d’un mois d’hibernation !"
jeudi 2 janvier 2025 –
Du soleil, une mer lisse, des soucis résolus, et c’est le monde entier qui s’illumine ! Après une « semaine noire », la fin d’année et l’entame de la nouvelle semblent enfin gâter une Clarisse qui a retrouvé le sourire en même temps que ses outils informatiques. Le soleil, le vent, les dauphins et les albatros en prime, en plus d’un cap Horn de franchi. Un peu comme si l’océan Pacifique souhaitait se faire pardonner…
Après un Noël où « le cœur n’y est pas vraiment » et un anniversaire maussade, admettant que c’était là « le jour où je me sens le plus de mauvaise humeur », « grumpy Clacla » a terminé son année 2024 sur de bien meilleures notes ! Elle qui regrettait ne pas pouvoir serrer sa fille dans ses bras ni profiter des siens, mais se consolait avec « l’océan, les albatros, et toute la mélancolie du monde pour ressentir l’amour des gens qui ne sont pas là » a été plus que servie ! Mercredi 31 décembre, la skipper de l’Occitane en Provence savourait donc le retour de conditions de mer et de vent plus agréables, davantage propices au repos, lu permettant de reprendre du poil de la bête après une traversée de l’océan Pacifique éprouvante. Ainsi à quelques milles du cap Horn, elle déclarait être « de bonne humeur », malgré des vitesses à la baisse, des concurrents à l’affut dans son tableau arrière et une job-list suffisamment conséquente pour occuper ce long jour sans vent.
Jeudi 1er janvier, en guise d’entame de la nouvelle année, elle dépassait le troisième et dernier cap de son périple, à 15:19:07 (FR) après 52 jours 02 heures 17 minutes et 07 secondes de mer. Désormais double cap-hornière, et très fière de l’être, « vieille louve de mer » qu’elle est en passe de devenir, Clarisse voyait pourtant son concurrent Benjamin Dutreux revenir de plus en plus proche, jusqu’à échanger quelques clichés inversés et se faire chipper sa 11e place. Mais là encore, le mental demeure le plus fort, bien aidée par un véritable cadeau de Mère Nature, lorsqu’elle voyait également débarquer une horde de dauphins, accompagnés par une nuée d’albatros, sur fond de ciel bleu chassant la grisaille. Un spectacle à couper le souffle, les géants du ciel et les marsouins noirs et blancs, typiques des eaux froides subantarctiques, se volant constamment la vedette. « Le plus beau jour de ma vie » s’extasiait-elle, ou tout du moins de l’année jusqu’ici, de façon certaine.
L’imaginaire pour compenser
Bien escortée donc, pour son retour dans l’Atlantique, Clarisse pouvait aussi se réjouir du retour du vent après 48 heures au ralenti. La faute à une zone de molle, qui aura au moins le mérite d’offrir le temps de profiter, tant franchir le cap Horn en solitaire reste une prouesse à la portée de si peu de mortels. Et si cette année encore, la navigatrice n’aura pu admirer le mythique caillou, perdu dans une brume épaisse une quarantaine de milles dans son nord, l’imaginaire sait compenser et la contemplation s’inventer. « On ne voit pas le cap Horn, mais on l’imagine ! Je me contente de ce que j’ai, et on peut dire que pour commencer 2025, ce n’est pas mal du tout. C’est mou, c’est lent, on se fait rattraper par derrière, ça ne s’annonce pas non plus très rapide sur la route qui nous attend devant, mais qu’est ce que ça fait du bien ! J’ai l’impression de sortir d’un mois d’hibernation ! »
Le sourire aux lèvres et ses joues réchauffées par le soleil, Clarisse Crémer peut en effet savourer , elle qui en a tant bavé dans des conditions infâmes, où le froid, la grêle et la neige ont participé à son calvaire, en plus des vagues qui venaient quotidiennement se briser sur le pont de son IMOCA jaune et bleu. Le visage reposé, Clarisse Crémer peut aussi se satisfaire d’y voir plus clair, aux portes de sa remontée vers les Sables d’Olonne, son ordinateur du bord réparé et son logiciel de routage retrouvé. Plus besoin de recourir à un logiciel de navigation secondaire pour la guider, depuis qu’elle est parvenue avec son équipe à relancer son précieux outil, après de longues heures de travail laborieux et minutieux dans une mer déchaînée : « Je n’ai jamais été aussi heureuse de voir un logo Windows de ma vie, j’en avais les larmes aux yeux ! »
Retour à la tactique
L’ambiance « survie » du Pacifique derrière elle, la skipper de L’Occitane en Provence peut désormais se remettre en mode stratégie. De nouveau armée pour un sprint final qui s’annonce aussi riche en incertitudes qu’en régate infernale, au contact avec ses principaux rivaux, elle pourra donc exprimer l’entièreté de son talent. Pour défier une dernière fois les éléments, à travers un ultime océan qui devrait, lui aussi avoir son lot de surprises, entre bulles anticycloniques bine installées, alizés mal établis, Pot-au-Noir à renégocier et dernier mois à encaisser…